Terre de pommes

Vallons verdoyants, haies bocagères, vaches et rivières poissonneuses, l'hexactitude vous emmène en Normandie à la rencontre de Cyril Zangs. A sa façon l'homme à l’inamovible béret est un alchimiste, maître dans l'art de la transformation de pommes en breuvages d'exception. Vinaigres, Calvados et bien sûr cidres pour ce qui concerne notre portrait du jour. Rencontré par un heureux hasard, Cyril m'avait livré un petit topo sur son processus de fabrication et invité à le suivre en immersion une fois l'automne venu.




Long et précis, l'élaboration d'un bon cidre nécessite d'être le plus rigoureux possible. Et cela démarre dès la cueillette où les pommes sont scrupuleusement sélectionnées en veillant à éliminer un maximum d'intrants (tiges, feuilles, pourriture, boue, …). Une fois récoltés, sur des arbres de plein vent, les fruits vont reposer 1 mois dans des filets de 25kg afin de mûrir et faire baisser leur taux d'azote. 2016 aura été une année de faible quantité mais qualitative pour les quelques 69 variétés recensées sur les points de cueillette. Cyril m'apprend que l'on répertorie 5 saveurs dominantes pour les pommes ; douce, douce/amère, amère, aigre, acidulée. Cette dernière est d’ailleurs la saveur dominante des pommes à couteau. Reposées, les fruits sont ensuite râpés et pressés par un engin ambulant âgé d'une soixantaine d'années. Les pommes sont pelletées dans un bac rempli d'eau où plongent de petits godets mécaniques qui prélèvent une fournée de fruits à chaque passage. Direction la râpe, positionnée en haut de la presse, d'où les copeaux de pommes tombent en pluie fine sur des toiles alvéolées, c'est ce qui est appelé « marc ». Les toiles sont ensuite pliées autour de la pulpe, empilées et pressées sur la partie avant de l'engin. Le jus de pomme peut alors couler vers un bac filtrant d'où il est aspiré et envoyé vers les cuves de fermentation attenantes. Chaque brassage va impliquer un travail de nettoyage quotidien de grande ampleur, souvent de nuit et piqué du fameux crachin normand. Soit 2 bonnes heures à laver, à l'eau sous pression, tous les ustensiles utilisés. Pour Cyril, c'est une opération cruciale afin d’éviter tout défaut de goût dans le produit final.





Nous voilà donc avec le jus de pomme dans la cuve. Une fois fermenté (naturellement, inutile de s’étendre là-dessus, tout est garanti sans intrants), le jus de pomme deviendra cidre mais pour cela Cyril applique une méthode ancestrale plus connue du côté de Reims ou d'Épernay. Comptez déjà 5 à 6 mois et quelques soutirages avant la mise en bouteille. Un peu de patience à nouveau, de l’ordre de 2 à 3 mois pour la prise de mousse qui matérialise la mise sur pupitres et l'ouverture de la période des remuages. Les dépôts vont ainsi rejoindre le col de la bouteille d'où ils seront expulsés au moment du dégorgement. Cyril complète alors avec le même cidre issu d'une autre bouteille avant de recapsuler pour de bon. Santé !


