L'HEXACTITUDE DU GESTE

De la terre au Pain

       Tout au nord de la Beauce, la ferme d'Orvilliers se dresse telle une oasis de verdure dans les champs de blé. La région est la plus grosse productrice de blé tendre en Europe. Ici, encore plus qu'ailleurs, les cultures intensives ont appauvri les sols, standardisé les épis mais Orvilliers prouve qu'une voie alternative existe, moderne et proche du terroir. A la ferme, on travaille la céréale paysanne ; rustique et bien élevée, elle sera bien plus nourrissante. Pas de pesticides, tout est nature et inscrit dans une filière courte car Adrien, Benjamin et Hélène sèment, récoltent, moulent, pétrissent, cuisent et vendent leur production selon le principe du paysan-boulanger. Adrien, boulanger au levain autodidacte et Benjamin, ingénieur agricole, ont lancé leur initiative sur la ferme familiale. Les deux frères ont converti une cinquantaine d'hectares en bio et lancé leur production en 2013. Ils s'appuient sur une démarche qualitative en sélectionnant les céréales les mieux adaptées à leur terres et en accordant à leur recettes le temps de fermentation nécessaire. Le pain est confectionné avec du levain fait maison, la spécialité d'Hélène qui a rejoint l'équipe en 2014. Ceci implique un temps de fermentation plus long et un travail d'entretien minutieux car le levain est une matière vivante qu'il convient de traiter avec égards. En ce jeudi matin, l'atelier est en pleine ébullition, le week-end approche et c'est à ce moment que la production est à son maximum. Sami, un jeune boulanger, est venu prêter main forte. La ferme propose 5 recettes classiques complétées par des pains spéciaux et de la brioche. Miches, boules et couronnes prennent forme entre les doigts experts des boulangers. Au milieu des vapeurs farinées, le déroulement de la journée suit un timing précis. Tout est calculé : matières premières employées, grammages, temps de pétrissage et de fermentation, cuisson,... Une fois sortis de l'immense four à sole tournante, les pains ont des allures de sculptures dorées. Alignés sur un meuble de bois, ils refroidissent avant de s'en aller garnir les étals des marchés locaux, épiceries bio, AMAP et ruches. Les mardis et vendredis, il est possible de venir se ravitailler directement à la ferme, une démarche en pleine expansion qui permet de se reconnecter au terroir tout en créant un lien social. La ferme est en développement perpétuel et les projets ne manquent pas. Outre le développement de l'agroforesterie qui entend l'implantation d'arbres et haies dans les champs, de nouvelles idées devraient ouvrir des perspectives de collaboration avec des boulangeries de la région ou la fabrication de pâtes.